Autant j’arrive à parler de ce que j’écris, autant j’ai beaucoup de mal à raconter ma peinture. Comme si je déléguais à cette dernière le soin de le faire elle-même. La peinture est un espace de liberté extraordinaire, car si le créateur est limité par les bords de la toile, il peut dans ce petit espace faire se rencontrer des choses, des gens, des situations qui ne se rencontrent jamais dans la vie. Sur l’écran blanc, il est possible de mélanger les temps, les civilisations, les personnages venus d’univers parfois antagonistes. Dans mes tableaux, des mondes différents se frôlent, s’interpénètrent, mais ne se fondent pas. La chaire vivante, ronde, colorée des touristes, souvent américains, côtoie des bas-reliefs millénaires. Se caressent le gris des pierres et la couleur de l’actuel, se croisent le passé, le présent. Je peins les gens, pas les paysages. Les touristes bigarrés font tache devant des œuvres d’art anciennes et graves. Chacun a quelque chose à voir avec l’autre, mais c’est discret, presque invisible. Des couleurs répondent à d’autres couleurs, des graphismes se retrouvent de manières inattendues. Je n’ai jamais su si ma peinture était tragique ou humoristique. On me renvoie les deux…
Peindre est une façon de voyager, d’aller voir ailleurs, de modifier l’habituel, de repenser la réalité, de faire rupture.
Avec l’espoir que cela fasse signe à quelqu’un…